C’est avec cette œuvre que Georges Rochegrosse, alors âgé seulement de 23 ans, débute au Salon des artistes français de 1882 et reçoit une médaille de troisième classe. Ce tableau est emblématique du goût de l’artiste pour les grands sujets historiques et les reconstitutions antiques qu’il traite avec réalisme.
L’épisode de la mort de l’empereur romain Aulus Vitellius (15-69) est relaté par Suétone dans les Vies des douze Césars. Ici, Rochegrosse s’intéresse moins à l’exécution de Vitellius qu’aux humiliations subies par l’empereur marchant sous les huées, les coups et les crachats vers le forum où il sera exécuté par la foule. L’épée tenue sous son menton le force à lever la tête, permettant au spectateur de découvrir le visage effrayé de l’empereur. Le cortège descend l’une des rues de Suburre, le bas-quartier surpeuplé et malfamé de Rome.
Deux gamins précèdent le cortège. Le premier est habillé de la pourpre impériale et le second est coiffé de la couronne de laurier habituellement réservée au triomphateur. Ils désignent aux visiteurs du Salon de 1882 l’horreur de cette déchéance. La toile peut alors être comprise comme un avertissement lancé aux élites, notamment à Léon Gambetta, dans le contexte politique troublé des années 1880.
Lors de sa présentation, la toile retient l’attention du public et des critiques, qui soulignent le respect des données littéraires et archéologiques, le réalisme cru des détails, le caractère cosmopolite et bigarré de la foule. Cette œuvre éclatante et dramatique est l’un des chefs-d’œuvre des Musées de Sens.