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Amas d’amphores au musée de Bibracte
Du sol au musée
A l’heure des changements climatiques, les musées sont des acteurs essentiels pour établir des ponts entre les témoins historiques des activités humaines et les grands défis de nos sociétés actuelles. Faire dialoguer nos collections autour de la thématique du sol, c’est mettre en lumière la diversité de nos relations avec le sol, support des plantes que nous mangeons et de nos maisons, de nos routes, lieu de prélèvement de nos ressources, archives de l’histoire de la vie et de l’histoire des hommes, support de nos paysages, habitat pour 60% de la vie terrestre, lieu d’émergence de la vie et de repos pour nos morts... Ce milieu méconnu, souvent ignoré, menacé, est pourtant vital pour la survie de l’humanité. Les musées, en tant que témoins de notre lien au sol à travers le temps, transmettent un message d’espoir en nous invitant, chacun selon ses possibilités, à préserver et à respecter notre environnement pour les générations futures.
Cette exposition s’inscrit en complémentarité avec l’exposition « Sols, la vie sous nos pieds », proposée par le Jardin de l’Arquebuse du 9 avril 2025 au 4 janvier 2026, qui met en lumière l’importance vitale du sol, un réservoir immense mais méconnu de biodiversité (60 % de la vie terrestre) et invite habitants/citoyens à participer concrètement à la préservation des sols.
Exposition réalisée grâce au concours d’Adèle Chéné, Félix Bourdot et Clara Malandrino, dans le cadre de leur Master 1 Histoire de l’Art.
Amas d’amphores au musée de Bibracte -
Amonite
Cette ammonite date du Sinémurien, un étage géologique du Jurassique inférieur (il y a environ 200 à 192 millions d’années) créé par Alcide d’Orbigny en 1849 et dont la définition et l’étude ont été permises grâce aux gisements de référence situés aux alentours de Semur-en-Auxois (d’où le nom « sinémurien » venant du latin« sinemurium » ou « sine muros », signifiant littéralement « sans murs » ou « vieux murs »).
Provenant de gisements géologiques retraçant l’évolution de l’histoire de la Terre, cette ammonite, comme les milliers d’autres fossiles de nos collections, illustre la diversité des êtres vivants aujourd’hui disparus ou évolués.
Musée de Semur-en-Auxois Amonite -
Ossements fossilisés du plateosaurus
Le sol est le lieu où, depuis des millénaires, les humains tirent leurs ressources : terre, minerais, pierres précieuses...
Connue depuis le XIXe siècle, les fouilles réalisées par Jean-Michel Mazin à Lons-le-Saunier dans les années 1990 confirment la richesse du sous-sol jurassien en matière de dinosaure.
Les terrains marneux du Trias supérieur (vers -210 Ma) livrent plus d’une centaine d’ossements qui appartiennent pour la plupart à des prosauropodes du genre Plateosaurus.
Les différentes découvertes européennes (Allemagne, Suisse, France) ont permis aux paléontologues de mieux comprendre le mode de vie de ces animaux disparus et de proposer des reconstitutions grandeur nature.
Pesant d’une à deux tonnes, ils pouvaient mesurer jusqu’à neuf mètres et pouvaient se tenir sur deux ou quatre pattes pour se nourrir ou se déplacer. Herbivores, ils vivaient en troupeaux dans un environnement côtier lagunaire, sous le climat tropical qui régnait alors sur la région au Mésozoïque inférieur.
A noter, Plateosaurus est aujourd’hui encore le plus vieux dinosaure connu en France !
Musées du Jura Ossements fossilisés du plateosaurus -
Carotte de tourbe
La tourbe est issue de la décomposition de la sphaigne, une mousse qui se développe dans les milieux humides et frais. Cette décomposition crée un milieu acide dans lequel l’oxygène ne circule pas, ce qui favorise la conservation de la matière organique et de l’enveloppe des grains de pollen déposés au cours du temps. L’analyse de ces pollens (ou palynologie) se fait en prélevant des échantillons le long d’une carotte. Leur identification et comptage sous microscope, associés à la datation des sédiments par dosage de radiocarbone (14C), permet d’identifier les espèces dominantes à chaque période et de révéler l’évolution des paysages. Ces études confirment que dans le Morvan, cette évolution est, depuis au moins six mille ans, plus dépendante de l’action de l’homme que des fluctuations du climat !
Cette carotte provient des sources de l’Yonne, une tourbière sur le mont Prénelay (commune de Glux-en-Glenne) à trois kilomètres et demi du site de Bibracte. Longue de 60 cm, elle couvre les trois derniers millénaires. Son analyse a révélé notamment un pic de déforestation à la fin de l’âge du Fer, en lien avec le développement d’espèces cultivées (céréales, légumineuses, châtaigner, chanvre), et un retour en force de la forêt autour de l’an Mil.
Musée de Bibracte Carotte de tourbe -
Plantes fossiles
Cet échantillon de houille présente un entrelacs d’empreintes de fronde de fougères et tronc de Cordaites datant du Carbonifère. Ce fossile montre une accumulation de plantes tombées au sol il y a environ 300 millions d’années, alors que notre région était recouverte d’une forêt luxuriante sans équivalent actuel.
Les conditions environnementales de l’époque ont conduit à l’accumulation d’une grande quantité de matière organique d’origine végétale qui s’est ensuite transformée, au fil des temps géologiques, en roche riche en carbone, comme la houille. Utilisée comme combustible, cette roche a été exploitée à Ronchamp, à partir d’affleurements puis de puits de mine, entre le XVIIe siècle et le XXe siècle.
Musées de Montbéliard Plantes fossiles -
Pecopteris (fougère), Cordaïte (feuilles), Annularia (prêle)
Au Carbonifère (359-299 millions d’années), en relation avec la tectonique des plaques, la région Bourgogne Franche-Comté actuelle bénéficie d’un climat tropical chaud et humide, abritant une faune abondante et diversifiée. Ainsi par exemple les fougères arborescentes du genre Pecopteris pouvaient atteindre plusieurs mètres de haut.
Muséum - Jardin de l’Arquebuse de la ville de Dijon Pecopteris (fougère), Cordaïte (feuilles), Annularia (prêle) -
Bourdon terrestre (Bombus terrestris (Linnaeus, 1758)
Au printemps, la reine fonde sa colonie dans une cavité existante comme un nid de rongeur abandonné. Durant deux à cinq semaines, elle collecte de du nectar et du pollen, pond et couve ses oeufs, nourrit les larves, Puis, relayée par les ouvrières, la colonie atteint jusqu’à 200 individus. A la fin de la saison d’activité, une nouvelle reine récemment fécondée va passer l’hiver à l’abri du froid, dans un hibernaculum, c’est à dire un petit terrier creusé par ses soins.
Muséum - Jardin de l’Arquebuse de la ville de Dijon Bourdon terrestre (Bombus terrestris (Linnaeus, 1758) -
Taupe (Talpa europaea Linnaeus, 1758)
Strictement carnivore, la taupe creuse des galeries à la recherche de ses proies. Ce mammifère est adapté à la vie dans le sol : quasi-absence de cou, courte queue, yeux minuscules et peu fonctionnels, ouïe et odorat très puissant, membres courts, larges « mains » en forme de pelle équipées de doigts griffus.
Muséum - Jardin de l’Arquebuse de la ville de Dijon Taupe (Talpa europaea Linnaeus, 1758) -
Escargots terrestre
Les escargots terrestres et leur diversité est méconnue, alors que leurs exigences écologiques et leur capacité de déplacement limité en font de bons indicateurs environnementaux.
Ces spécimens proviennent d’une collection malacologique constituée dans l’arrondissement de Montbéliard au XIXe siècle. Les maillots barils, Orcula dolium (Draparnaud, 1801), vivent généralement dans la litière, sous la mousse dans les bois, parmi les rochers, à moyenne et haute altitude. L’Est de la France (Jura et Alpes) constitue la limite occidentale de leur aire de répartition. Les hélices grimaces, Isognomostoma isognomostomos (Schröter, 1784), répandus dans la région, vivent dans les forêts de pente humide, à moyenne ou haute altitude.
Musées de Montbéliard Escargots terrestre -
Microscope de type Cuff
L’invention du microscope au 18e siècle permet aux naturalistes, comme Buffon, d’observer des organismes jusqu’alors invisibles à l’oeil nu. C’est alors une véritable révolution. Au cours des 19e et 20e siècles, les connaissances s’accumulent et de plus en plus d’espèces sont décrites. Malgré cela, le sol reste un milieu méconnu, car difficile à observer. Depuis une vingtaine d’années, la connaissance des organismes y vivant a connu une seconde révolution à partir de l’étude de l’ADN. Les spécialistes estiment qu’au moins 60% de la biodiversité terrestre vit sous la terre. Elle est constituée, en grande majorité, d’organismes microscopiques notamment des bactéries et des champignons.
Musée Buffon de la ville de Montbard Microscope de type Cuff -
Hipposandale
Utilisée pour préserver les pieds des chevaux notamment en cas de blessure, pour les soigner (agissant comme un pansement pour assurer l’efficacité d’une pommade), pour le déplacement rendu compliqué sur des terrains glissants à cause des intempéries ou du climat. Elles ne sont donc pas portées en permanence mais seulement pour des cas précis et sont régulièrement contrôlées pour réparation ou nettoyage.
Cet objet a pu être employé pour faciliter la marche des équidés, notamment lors des travaux agricoles comme les labours.
Musée de Semur-en-Auxois Hipposandale -
La revanche des boeufs
Cette image publicitaire pour l’horlogerie Peyron-Castille (située rue Bossuet à Dijon, jusqu’en 1926) met en scène sur un ton humoristique « la revanche des bœufs ». Si cette imagerie n’a rien à voir avec l’horlogerie, elle fait partie d’une série d’images amusantes, distribuées en guise de publicité. Celles de l’horlogerie Peyron-Castille forment une série sous forme de saynètes, avec des personnages en silhouettes noires, sur fond vert et gris. Les thématiques sont très diverses : montreur d’ours, combat d’épées, course à pied… Ici, l’amusement repose sur l’inversion : deux bœufs, debout sur leurs pattes arrières, prennent la place de deux paysans qui se retrouvent attelés à la charrue. L’un des bœufs fume la pipe en tenant la charrue, tandis que l’autre fait le cocher. Le titre donné à cette image interroge : la « revanche » sous-entend un traitement injuste, auquel l’inversion vient donner réparation.
Musée de la Vie Bourguignonne La revanche des boeufs -
Labour dans le Mâconnais Honoré Hugrel (1827 ; 1921)
Le travail de la terre est ancien, il se met en place probablement dès les débuts de l’agriculture. En Egypte au temps de la construction des pyramides, les paysans passent l’araire dans les champs pour recouvrir la semence et remuent le sol en surface à l’aide de la houe. A l’époque Gallo-romaine, le travail du sol peut comporter un retournement du sol à l’aide d’instruments aratoires, dont la charrue et l’araire à double-oreilles. Au cours du Moyen-âge, le travail du sol se pratique à la bêche, à l’araire et à la charrue, cette dernière plutôt dans dans les sols riches et lourds du Nord. L’outillage agricole commence a évoluer véritablement à partir de la révolution industrielle, avec l’apparition de charrues en métal. Cette peinture d’honoré Hugrel peinte en 1922 témoigne de pratiques agricoles considérées comme traditionnelles, dans un monde en cours de transition vers des pratiques plus modernes, où les charrues seront tractées par des machines. Les labours sont plus profonds et s’accompagnent le plus souvent d’une mise à nu des sols, ainsi qu’un usage de produits chimiques, engrais ou biocides. Nous savons aujourd’hui que ces pratiques agricoles ne sont pas appropriées pour la vie du sol. A long terme, elles rendent le sol inhospitalier pour les organismes et limitent son fonctionnement biologique et ses « services écosystémiques », comme par exemple la filtration de l’eau ou la fertilité des sols.
Musée des Ursulines de Mâcon Labour dans le Mâconnais Honoré Hugrel (1827 ; 1921) -
Arrachage des souches avec le tire-cep Alfred Gaspart
Durant son séjour bourguignon (1935-1936), Alfred Gaspart travaille, peint, dessine, photographie et entretient une correspondance régulière avec sa soeur Paule, de sept ans son aînée, mais surtout sa muse et sa complice. Il sillonne à pieds et à bicyclette les vignes de Beaune, Pommard, Meursault, Volnay, Vougeot, rencontre les travailleurs de la vigne et du vin et partage de nombreux moments dans l’observation d’une nature qui évolue au rythme des saisons et des heures du jour. Il documente avec plus de 400 photographies, une année de travail dans les vignes. Celle-ci nous montre l’arrachage des souches, durant la saison hivernale.
Une fois les vendanges terminées, les vignerons arrachent les ceps morts ou ceux à remplacer. Avant de repiquer un jeune plant, l’ancien pied de vigne et ses racines sont ôtés à l’aide d’un tire-cep, les cailloux enlevés et le trou approfondi. Cette photographie rend bien compte, dans une composition travaillée, du travail minutieux et exigeant que cette opération représente.
Musée de la Vie Bourguignonne Arrachage des souches avec le tire-cep Alfred Gaspart -
Cruche à boire
Les musées de Montbéliard possèdent dans leurs collections des cruches à boire du XIXe siècle. Celles-ci étaient réalisées en grès. Il s’agit de céramique constituée d’argile et de sable très fin, cuits à plus de 1 200 degrés. La Franche-Comté possède en nombreux lieux ces matières premières, d’où le nombre significatif d’atelier de poterie, de tuilerie et de verrerie. Cette cruche proviendrait du réputé village de potiers de Boult en Haute-Saône. Le bourg et ceux environnants sont riches en sable et en argile (marne), au point qu’en 1886, 25 potiers y étaient recensés.
La cruche dont il est question, possède un goulot avec une anse qui lui est parallèle. L’objet sert en effet à boire et non à verser. L’axe de l’anse permet une facilité de préhension, l’autre main soutenant la base de la cruche. Ces « pots à boire » étaient utilisées lors du travail du sol, dans les champs ou dans les vignes, c’est pourquoi nombre de famille en possède encore, dans leur maison. Cet objet commun, du quotidien, n’en été pas moins travaillé, avec des motifs géométriques ou végétaux, et des couleurs variables (rouge, noir, violet, blanc, brun, jaune, etc.), réalisés grâce à des glaçures de divers oxydes métalliques.
La porosité de l’argile permettait une évaporation négligeable, mais suffisante pour permettre à l’eau de garder une température basse malgré la chaleur. Les cruches pouvaient aussi être mises à l’ombre ou à tremper dans un ruisseau ou un petit canal d’irrigation. De ce fait, l’objet était en somme, résistant, pérenne, et très pratique pour nos aïeux, majoritairement paysans.
Musées de Montbéliard Cruche à boire -
Pot à pharmacie
Ce pot à pharmacie d’origine italienne porte l’inscription "OL[EUM]. Lombricus". Il contenait de l’huile de lombrics. Ainsi, cuit, distillé, réduit en poudre, le ver de terre était, à l’époque moderne, utilisé comme graisse, servant de liant dans laquelle on incorporait d’autres ingrédients. Nicolas Lémery (1645-1715) le préconise pour soigner le scorbut, l’apoplexie, la paralysie. Il propose une « eau de ver de terre magistrale » et de « l’esprit de ver ». Il n’est aujourd’hui plus utilisé en occident, mais la pharmacopée chinoise l’utilise pour traiter l’asthme et ou l’épilepsie.
Musée de la faïence et des Beaux-Arts de Nevers Pot à pharmacie -
Carreau de pavage
Ce carreau de pavage de la fin du Moyen-Âge, en terre cuite vernissée décoré de rinceaux de grande taille est un exemple de l’exploitation des sols argileux à des fins de construction. Il provient du château de Villaines-en-Duesmois.
Musée de Semur-en-Auxois Carreau de pavage -
Amas d’amphores
Le sol nous est précieux de multiples façons. Cet amas d’amphores reconstitué tel que les archéologues l’ont observé pendant les fouilles témoigne à la fois parfaitement des traces de la vie passée des hommes enfouies dans le sol et de l’usage du sol comme ressource, pour la fabrication d’objets du quotidien. L’étude de la pâte de ces amphores associée à celle de leur forme et des marques parfois imprimées dans l’argile permet de localiser leur origine en Italie centrale. Chaque campagne de fouille à Bibracte livre quelques centaines de kilos de fragments d’amphores, qui sont en majorité des amphores à vin d’origine italique. Ces récipients encombrants et imputrescibles étaient le plus souvent brisés en tessons qui servaient à paver les sols des rues et des maisons. D’autres fois, on se contentait de les enfouir pour s’en débarrasser, comme dans cette fosse-dépotoir reconstituée. Ces tessons si nombreux laissent penser que la consommation de vin s’était infiltrée dans toutes les couches de la population.
Musée de Bibracte Amas d’amphores -
Dépôt non funéraire de l’âge du Bronze
Le sol est le lieu où, depuis des millénaires, les humains tirent leurs ressources : terre, minerais, pierres précieuses...
Cet ensemble, constitué d’une cinquantaine de pièces de vaisselle de bronze, a été découvert fortuitement en 1998 à Évans, Les Carcailles (Jura). Il est daté de l’âge du Bronze final (environ 950 av. J.-C.).
Il comprend tout d’abord un grand chaudron muni de deux anses provenant de la région des Carpathes, un vase biconique, un pichet-situle malheureusement très endommagé, une grande passoire pour laquelle les rares comparaisons sont à chercher en Hongrie ou au Danemark, ainsi qu’une passoire plus petite qui pourrait être de fabrication locale. Quatre chaudrons miniatures dont deux sont encore munis d’une anse. La catégorie la plus importante (trente-sept exemplaires) est celle des tasses et des coupes dont certaines ont pu être fabriquées localement, tandis que d’autres proviennent de régions plus à l’Est. Enfin, l’ensemble est complété par six petites fioles.
Il s’agit donc d’un service luxueux, qui a pu servir lors d’un banquet cérémoniel réunissant différents personnages appartenant à l’élite. Il constitue ce que l’on appelle un dépôt, c’est-à-dire un groupe d’objets volontairement réunis et enfouis dans le sol. Cette pratique, emblématique de l’âge du Bronze, est un phénomène complexe. Les motivations sont sans doute multiples. Dans le cas présent, la réunion d’un nombre exceptionnelle de pièces, leur très grande qualité, ainsi que la provenance variée et très lointaine de certaines d’entre elles, laisse supposer qu’il s’agit d’une forme d’offrande aux puissances surnaturelles.
Musée du Jura Dépôt non funéraire de l’âge du Bronze -
Intailles antiques
Le sol est le lieu où, depuis des millénaires, les humains tirent leurs ressources : terre, minerais, pierres précieuses...
Lors des fouilles réalisées place de la Comédie à Lons-le-Saunier en 1989-1991, un collecteur d’eaux usées antique a été identifié et fouillé. C’est dans son remplissage qu’ont été découvertes 63 intailles, indiquant que cette évacuation provenait probablement de thermes. La chaleur et l’humidité étaient en effet propices au décollement de ces chatons de bague et à leur perte. Compte tenu de l’importance du lot, il s’agit sans conteste de bains publics, sans que l’on puisse en préciser la nature : thérapeutique, sacrée ou ordinaire.
Cet ensemble exceptionnel comprend des pierres fines translucides : prase, améthyste et cornaline, mais aussi quelques pierres opaques : nicolo et jaspes. Quelques exemplaires en verre sont également présents.
Les décors sont de différentes natures. Les figures divines et personnifications (Victoria et Fortuna notamment) sont très représentées, en particulier Eros. On trouve également des représentations humaines : guerriers, danseuses, bergers, sportif, etc, ainsi que des animaux : bovins, capridé, coqs, perroquets, aigle et chiens. Quelques intailles représentent des symboles : galère, astres, cistes. Enfin, il faut citer deux héros : Héraklès et Omphale.
Gravés dans les pierres fines ou moulé pour les intailles en verre, les décors nous renseignent à la fois sur la chronologie (Ier-IIe s.), grâce aux évolutions stylistiques, et sur les porteurs de ces parures. Les thèmes représentés montrent ainsi une prédominance du monde féminin.
Musée du Jura Intailles antiques -
Ebauche de meule
Cette meule inachevée a été prélevée dans les anciennes carrières du Bois de Joux, en Côte d’Or, vaste zone d’exploitation de vaugnérite pour la fabrication de meules rotatives située à 70 km au nord de Bibracte. La vaugnérite est une pierre abrasive de la famille des roches plutoniques à structure grenue mais pétrographiquement et chimiquement bien différente des granites. Elle est bien reconnaissable à l’œil nu par sa richesse en mica noir. Site meulier important à l’échelle de la Gaule, le Bois de Joux a livré de nombreuses ébauches de meules, correspondant à des ratés de taille, qui ont été prélevés par les habitants de la commune de Saint-Andeux tandis que d’autre sont toujours visibles dans les talus de la carrière.
L’oppidum de Bibracte a livré plus de 400 meules rotatives, entières ou à l’état de fragments. Une petite partie (5%) est en basalte d’Auvergne, roche très dure particulièrement recherchée pour la fabrication des meules. La majorité (80%) est en grès et conglomérats originaires d’affleurements situés à l’est et au sud-est d’Autun, plus proches mais de moindre qualité. Celles en vaugnérite du Bois de Joux (15%) représentent un choix intermédiaire alliant bonne qualité et relative proximité.
Musée de Bibracte Ebauche de meule -
Lampe à huile
Cette lampe à huile importée des régions méridionales se caractérise par son médaillon à décor moulé représentant un criquet. Elle a été découverte en 1993 dans une fosse à incinération de la nécropole de Bibracte, mise au jour lors des fouilles menées à partir de 1992 pour aménager le parking du musée. Cette nécropole est utilisée de la fin du IIe siècle avant notre ère jusqu’au changement d’ère (comme en témoigne cette lampe datée de la fin de la période augustéenne), soit durant toute la période de fonctionnement de l’oppidum. Elle est située au pied du mont Beuvray, en dehors de l’oppidum, donc à l’écart du monde des vivants, mais au carrefour de plusieurs voies importantes.
Au total, 96 enclos funéraires et 85 tombes ont été mis au jour et révèlent la pratique majoritaire de l’incinération. Certaines tombes ont livré une quantité importante de mobilier, principalement céramique ou métallique. La présence de lampes à huile en contexte funéraire n’est pas rare. Elles pouvaient revêtir une fonction symbolique (éclairer le défunt dans son voyage vers l’au-delà ?), participer au rituel funéraire ou manifester le statut social du défunt.
Musée de Bibracte Lampe à huile -
Les caves de Lavardin François-Louis Français
Fameux paysagiste, François-Louis Français, habitué à sillonner les chemins sur un âne pour crayonner à son aise, peint ici les habitations troglodytiques creusées dans la roche dites « Les Caves » du site de Lavardin dans l’actuel Loire-et-Cher.
Le village insolite, perché sur un promontoire rocheux, est célébré par le poète de la Renaissance Pierre de Ronsard, originaire de la région. Le château du village, en ruines depuis la fin du XVIe siècle est une source d’inspiration inépuisable pour qui veut représenter la nature reprenant ses droits. Sa « motte féodale », fortification en terre, surplombe des grottes, pour certaines habitées et aménagées dès le XIe siècle.
Ce motif de la grotte enfouie sous la végétation, qui plus est « habitée », séduit le peintre et nourrit son imaginaire : une hypothèse du milieu du XIXe siècle prêtait en effet à ces grottes un usage druidique, réfuté aujourd’hui.
Dijon, Musée des Beaux Arts Les caves de Lavardin François-Louis Français -
Le miroir d’Ornans ou Vue d’Ornans Gustave Courbet
Peint en 1872 par Gustave Courbet (1819-1877), le sujet de cette œuvre est une vue d’Ornans, sa ville natale, où le peintre revient régulièrement toute sa vie. La rivière, la Loue, qui occupe le centre de la toile, est entourée d’un paysage typique de la vallée et d’habitations ornanaises. En arrière-plan sont présentes les falaises calcaires, autre motif caractéristique des paysages de l’artiste pour les grottes et cavités qu’elles offrent.
Les sols calcaires influencent la géographie des rivières autant que leur écosystème. Friables, ils craquellent en période de sècheresse mais offrent, à l’inverse, un environnement alcalin et favorable au printemps pour de nombreuses espèces, comme la truite. Filtre naturel, lorsque la pluie pénètre ses couches souterraines, elle se purifie et limite la concentration de certains polluants avant d’atteindre le lit de la rivière. Néanmoins, les surfaces calcaires retiennent et accumulent des substances qui peuvent exacerber les problèmes d’eutrophisation, conduisant à un surdéveloppement de plantes aquatiques qui perturbent la faune.
Musée Courbet Le miroir d’Ornans ou Vue d’Ornans Gustave Courbet -
Carrière Bibemus André Masson
Installé dans la région d’Aix-en-Provence depuis 1947, André Masson peint les couleurs et la luminosité des paysages qui l’entourent : le plateau Bibemus et ses carrières fournissent la pierre chaude et blonde typique de la région. Masson consacre une série de peintures aux arbres, rochers, gorges, combes, grottes et falaises de cette terre. Une période heureuse pour l’artiste après les traumatismes de la guerre ; Masson n’oublie rien de ses cauchemars mais traque la lumière de cette nature éternellement changeante.
Musée d’Art moderne de Belfort – donation Maurice Jardot Carrière Bibemus André Masson -
Les roches d’Agay Armand Guillaumin
Au début du siècle, alors que le tourisme se développe, les peintres impressionnistes se passionnent pour les roches rouge d’Agay et de l’Esterel. Armand Guillaumin a réalisé plusieurs dessins et peintures de ces roches, dont un pastel conservé au musée d’Art et d’Histoire de Belfort. Ces roches affleurant à la surface sont d’origine volcanique et témoignent de l’histoire passée du sol : elles datent du Permien (-250 à -280 millions d’années)
Musée d’Art et d’Histoire de Belfort Les roches d’Agay Armand Guillaumin -
Sans titre Ernest Boguet
Artiste local passé par les Écoles des Beaux-Arts de Dijon et de Nancy et par l’École nationale des Beaux-Arts de Paris, exposé aux salons des artistes français dans les années 1930, Ernest Boguet (1902-1975) réalise ici une vue de Montbard. Le spectateur se situe à proximité de la gare, au bord du canal, dans un angle qui permet de visualiser les cheminées des usines de métallurgie qui font la renommée de la ville dès le début du XXe siècle. Montbard est la cité de Buffon. Il s’agit du lieu de vie et de travail préféré du célèbre naturaliste du XVIIIe siècle, connu pour la rédaction de son Histoire naturelle, générale et particulière et pour avoir été l’Intendant du Jardin du Roi, avant que celui-ci ne devienne le Muséum national d’Histoire naturelle. L’histoire de Montbard se tourne, dès la fin du XIXe siècle, vers l’industrie. Les deux faits ne s’opposent pas, les travaux des naturalistes, favorisés par la royauté et par des ministres comme Colbert, devaient trouver des applications concrètes. L’industrie s’en est donc emparée. À Montbard, l’arrivée de celle-ci, facilitée par la présence du rail et l’accès au canal, a transformé les paysages. Aux prairies que Buffon observait depuis son cabinet de travail succèdent les usines qu’Ernest Boguet apprécie de peindre tandis que le destin des deux tours du parc de Buffon – héritées des ducs de Bourgogne – est désormais lié à celui des cheminées de l’industrie.
Musée Buffon de la ville de Montbard Sans titre Ernest Boguet -
Place d’Armes de Belfort après le siège de 1870-1871 Photographie du studio Gerst et Schmidt de Colmar
Avant le siège de 1870-1871, il existait peu de clichés de Belfort et sa Citadelle. C’est le studio Gerst et Schmidt de Colmar, pourtant réputé pour ses portraits, qui est le premier à rentrer dans la ville ravagée pour fixer sur papier les paysages urbains défigurés par la guerre. Des clichés modernes et douloureux, réels témoins des débuts de la photographie de reportage dans la région. Ils traduisent la gravité de la guerre moderne, avec sa nouvelle puissance de feu et ses bombardements intensifs. Les Musées de Belfort possèdent une large série de ces photographies du studio Gerst et Schmidt qui révèlent le paysage de la guerre industrielle : la gare, les ponts, les rues, les bâtiments et bien sûr « l’imprenable » Citadelle sont criblés d’éclats d’obus quand ils ne sont pas entièrement détruits. Cette photographie est également un témoignage de l’apparence de la Citadelle avant que Bartholdi n’y construise le Lion, commémorant justement la résistance de la ville assiégée par les Prussiens.
Musée d’Art et d’Histoire de Belfort : section Histoire Place d’Armes de Belfort après le siège de 1870-1871 Photographie du studio Gerst et Schmidt de Colmar -
Reconstitution d’une sépulture mérovingienne de la nécropole de Bourogne
Cette reconstitution évoque la sépulture mérovingienne n° 5 de Bourogne. Si le squelette provient des fouilles archéologiques du cimetière mérovingien de Saint-Quentin à Lure (tombe n° 46), les autres items proviennent effectivement de Bourogne grâce à l’important dépôt de la Société belfortaine d’émulation aux Musées de Belfort en 1942 : scramasaxe, épée, plaques-boucles, boutons… Le site fut occupé par une tribu burgonde qui y a établi un vaste cimetière mérovingien comprenant 214 sépultures dont les squelettes étaient tous orientés selon l’axe de la course du Soleil (tête à l’est et pieds à l’ouest). Les fouilles menées entre 1907 et 1908 ont permis de retrouver plus de 800 objets attestant de l’importance du site.
Musée d’Art et d’Histoire de Belfort Reconstitution d’une sépulture mérovingienne de la nécropole de Bourogne